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Voici quelques notes au sujet des néologismes qui devraient bien illustrer la situation actuelle, en France et en Espagne en particulier, mais pas exclusivement.
En raison des flux migratoires qui affectent de nos jours des millions de personnes à travers le monde, il plane dans les médias un certain doute quant au bon mot à employer pour désigner ces personnes de manière générale. Comme le précise la Fundación del Español Urgente en date du 23 octobre 2018, migrante est le terme le plus générique pour se référer à toute personne qui abandonne l'endroit où elle habite pour une destination où elle souhaiterait s'installer. Le mot migrante englobe donc les termes emigrante et inmigrante. En français, c'est exactement la même chose puisque migrant désigne aussi bien émigrant qu'immigrant.
La Fundación del Español Urgente nous précise en date du 1er novembre 2018 que le mot esmog, avec un e initial typique de l'espagnol avant le s devant une autre consonne, est l'adaptation tout à fait normale et valable de l'anglais smog, terme qui désigne le mélange de brouillard et de fumée caractéristique de certaines grandes villes.
La même Fundación del Español Urgente souligne, en date du 2 novembre 2018, que les substantifs electrolinera, gasinera et hidrogenera, créés par analogie avec le terme gasolinera, sont tout à fait acceptables en espagnol.
Le substantif esp. wasap (‘message envoyé via l'application de messagerie instantanée WhatsApp’), ainsi que son verbe dérivé wasapear (‘échanger des messages via WhatsApp’), sont désormais des adaptations adéquates en espagnol. Voir par exemple ici.
Le mot youtuber vient de faire son entrée dans le Oxford English Dictionary (OED), dictionnaire considéré comme le plus complet sur l'anglais britannique. Voir ici.
La FUNDÉU (Fundación del Español Urgente) nous informe et/ou nous rappelle que les néologismes créés à partir du préfixe super- s'érivent sans accent sur cette particule : superbacteria, supermicrobio, etc. Le mot súper porte bien l'accent en tant qu'adjectif (par ex.: Es súper esta peli) ou substantif résultant de l'apocope de supermercado : Hemos ido al súper a poner gasolina. Voir ici ou là sur ce point en particulier, là-bas pour d'autres "histoires" de préfixes et d'accents en général.
Après le cocooning adopté en Espagne comme en France, voici que la langue espagnole doit faire face (ou non) à un énième anglicisme : nesting, qui fait allusion au fait de rester chez soi pendant le week-end. La Fundación del español urgente a jugé bon dernièrement de préciser que les expressions plan casero et quedarse en casa sont deux alternatives tout à fait valables en espagnol.
Cela dit, on entend souvent dans les médias des phrases comme : «Contra la moda del nesting: salir a la calle es más saludable», «Seis razones para practicar nesting el fin de semana» ou encore «El nesting te permite durante el fin de semana recuperar el sueño perdido».
Nesting est un terme anglais issu du substantif nest, qui signifie ‘nid’ en français (et bien sûr 'nido' en espagnol), d'où l'action métaphorique de « nicher » à la maison ou d'y rester pendant le week-end pour se consacrer à la lecture, à la cuuisine, à visionner des films... ou, simplement, à se reposer. Or ce sens peut très bien être rendu en espagnol par les expressions quedarse en casa ou plan casero, qui peuvent tout simplement remplacer le nesting en question, alors devenu inutile. Quoi qu'il en soit, si l'on préfère utiliser ce terme, il doit être écrit en italiques ou bien, si l'on ne dispose pas de ce type d'écriture, être mis entre guillemets car il s'agit d'un emprunt non adapté.
Cúbit, plutôt que qubit, est la graphie recommandée comme alternative abrégée de bit cuántico. Dans les nouvelles en sciences et technologies il est parfois fait allusion à ces bits, comme dans «Los qubits son la contrapartida cuántica de los bits utilizados en la informática tradicional», «El computador cuántico: cuando el qubit se coma al bit» ou encore «Los ordenadores imaginados por Feynman se basarán en qubits que pueden ser 0 y 1 a la vez».
La graphie qubit (parfois même qbit) fait référence au bit cuántico, adjetif qui, en physique, designe ce qui est relatif aux quanta d'énergie. Le terme cuanto (fr. quantum) vient du latin quantum, qui signifie ‘quantité’ et qui, selon l'orthographe de l'Académie Espagnole, est un mot adapté tout naturellement en espagnol, comme bien d'autres termes latins incorporés récemment à travers la terminologie scientifique.
Ainsi, de même que l'on parle de physique quantique ou de bit quantique, on recommande en espagnol la graphie cúbit (cúbits au pluriel), et non pas qubit/qbit, avec un q, pour faire référence à ce type de bits.
Dans les exemples précédent, il aurait donc fallu écrire «Los cúbits son la contrapartida cuántica de los bits utilizados en la informática tradicional», «El computador cuántico: cuando el cúbit se coma al bit» y «Los ordenadores imaginados por Feynman se basarán en cúbits que pueden ser 0 y 1 a la vez».
La locution ficción climática est une bonne alternative en espagnol à l'anglicisme cli-fi, qui renvoie à un à style de films et de romans, entre autres oeuvres de création, en rapport avec les possibles conséquences catastrophiques du changement climatique.
Dans les médias il est de plus en plus fréquents de trouver la forme anglaise dans des phrases comme «El ‘cli-fi’ inunda las pantallas» ou «En el futuro irremediablemente apocalíptico en el que vive el protagonista de la primera cli-fi novel que aterriza en nuestro país, todo lo que hay es sed, tipos armados…». Cli-fi est un raccourci de l'anglicisme climate fiction, que l'on peut traduire en espagnol par ficción climática, expression qui bénéficie déjà d'un certain usage dans les médias et qui semble plus claire pour la plupart des lecteurs.
Pour se référer à ce genre de films ou romans qui présentent une société dystopique, c'est-à-dire imaginaire et non désirée, avec des problèmes en rapport avec le climat, le réchauffement global, le dégel des pôles ou la pollution, il est également possible d'utiliser en espagnol la locution clima ficción (en deux mots et sans trait d'union), formée sur le modèle de ciencia ficción.
Selon le même organisme, un nouveau mot pourrait faire son chemin. Il s'agit de laborocio, qui n'est autre que la somme de labor et de ocio. Ce mot valise serait censé remplacer l'anglicisme bleisure, résultat de la contraction entre business et leisure, mais là encore, au vu de ce que l'on trouve sur Internet en cette fin mars 2017, il semblerait que la tentative de rejet du terme anglo-américain soit loin d'être gagnée.
La RAE (Real Academia Española) s'emmêle les pédales et déconcerte les usagers : dans un premier temps elle admet que yintónic est la bonne adaptation en espagnol de l'anglais gin-tonic, puis elle fait marche arrière en déclarant que ladite adaptation est incorrecte. Voir ici et surtout là.
La Fundación del Español Urgente considère comme correct l'usage du mot electrolinera, de création nouvelle, pour définir les stations-services qui distribuent de l'énergie pour recharger les batteries des automobiles électriques. Formé à partir de eléctrica et gasolinera, le mot en question a peu de chances de trouver un équivalent en français.
Un nouveau mot est né il y a quelques temps de cela : hispanounidense. Ce néologisme s'applique aux personnes d'origine hispanique —qu'elles parlent ou non espagnol— qui résident aux État-Unis.
De l'espagnol, du français... Du français et de l'espagnol... Une fois n'est pas coutume, l'espagnol adopte ici un anglicisme qui n'apparaît pas en français : pen drive. La Fundación del Español Urgente rappelle tout de même que cet anglicisme, orthographié pen drive ou pendrive, doit apparaître en espagnol en italiques ou entre guillemets. La Fundéu BBVA signale par ailleurs qu'il existe en espagnol des expressions qui ont le même sens et qui peuvent donc être employées au lieu dudit terme étranger : memoria externa, memoria USB, memoria flash, lápiz USB, lápiz de memoria et lápiz digital. En français, on parle le plus souvent de clé USB.
La Fundación del Español Urgente recommande que le mot bótox s'écrive ainsi, en minucules et avec un accent écrit. On parle fréquemment à propos notamment de chirurgie faciale du botox, parfois écrit ainsi, sans accent et avec une minuscule à l'initiale, et d'autres fois avec une majuscule : Botox. L'usage de cette majuscule est justifié quand le terme en question est pris en tant que nom propre, comme nom de la marque du produit, mais l'usage a fait que le français et l'espagnol le considèrent déjà comme un nom commun : fr. botox et esp. bótox.
La Fundación del Español Urgente précise que le pluriel de web est webs et elle ajoute que ce mot doit s'écrire en minuscule à l'initiale et sans italiques (en lettres normales). On a pu observer que dans de nombreux articles de presse le pluriel de web est utilisé de façon incorrecte, comme on peut le constater dans les exemples suivants : «Ha llegado a ser una de las web que más usuarios tiene al día»; «La mayoría de las web de las grandes empresas españolas no llegan al 50 % de accesibilidad»; «Las autoridades chinas denunciaron hoy que 81 páginas web gubernamentales recibieron ataques». Selon la Nueva gramática de la lengua española, les mots étrangers incorporés à l'espagnol et finissant par une consonne autre que n, l, r, d, j et z forment leur pluriel en ajoutant simplement un s final: airbags, anoraks, clips, robots ou webs, entre autres. Ainsi dans les exemples précédents on devrait avoir écrit: «Ha llegado a ser una de las webs que más usuarios tiene al día»; «La mayoría de las webs de las grandes empresas españolas no llegan al 50 % de accesibilidad»; «Las autoridades chinas denunciaron hoy que 81 páginas webs gubernamentales recibieron ataques».
Le Diccionario panhispánico de dudas recense aussi le pluriel webs et sur le genre il explique qu'il sera féminin (la web) si le substantif sous-entendu est página, et masculin (el web) si le substantif sous-entendu est sitio.
La Fundación del Español Urgente recommande l'usage de ferri et de son pluriel ferris, adaptations graphiques proposées par la Real Academia Española pour le mot anglais ferry. Il est vrai que divers médias écrivent ferry et, au pluriel ferrys ou ferries. Des dictionnnaires comme celui de María Moliner, celui de Manuel Seco, le Vox ou le Clave enregistrent le mot ferry comme emprunt à l'anglais et acceptent comme pluriel aussi bien ferrys que ferries. Quoi qu'il en soit, la Fundéu BBVA, qui travaille avec l'assistance de la Real Academia Española, en suivant ce qui est précisé dans le Diccionario panhispánico de dudas, recommande ferri et son pluriel ferris et propose d'éviter le pluriel ferries. Il es rappelé par ailleurs que si l'on veut maintenir le vocable anglais, il suffit de l'écrire en italiques ou entre guilllemets.
Il fut un temps où les termes anglais parvenaient en Espagne à travers le français. Aujourd'hui, ce n'est plus forcément le cas et l'espagnol doit parfois réagir seul face aux anglicismes superflus. Ainsi la Fundación del Español Urgente recommande d'éviter l'anglicisme clínic pour désigner un cours que l'on donne sur une matière déterminée à un groupe de professionnels ou d'étudiants. Elle propose d'employer à sa place des termes ou expressions telles que curso, curso intensivo, encuentro ou concentración. Dans de nombreuses nouvelles, surtout sportives, on utilise clínic pour se référer à un cours à caractère théorico-pratique donné en général par des personnes au prestige reconnu et qui inclut parfois une démonstration. Employé tout d'abord uniquement dans le monde du basket-ball, son usage s'est étendu à d'autres disciplines, si bien qu'il n'est pas rare d'entendre des phrases telles que «Este clínic ha servido para acercar a los aficionados a dos de las figuras más importantes del atletismo español»; «... compartirán con los usuarios asistentes al clínic de pádel una jornada completa de entrenamiento». La Fundéu BBVA conseille que dans de tels cas on emploie les termes espagnols équivalents que nous avons rappelés un peu plus haut pour éviter cet «anglicismo innecesario». Il semblerait que le problème ne se pose pas en français.
En français, le terme anglo-américain wifi (abréviation de Wireless Fidelity) est accepté sous plusieurs formes : Wi-Fi pour le Petit Larousse 2010, wifi ou wi-fi selon le Petit Robert 2009. La Fundación del Español Urgente, quant à elle, recommande d'accepter wifi comme terme espagnol et donc de l'écrire sans italiques : wifi. De nombreuses marques sont devenues, de par leur usage répété par les locuteurs de telle ou telle langue, des substantifs communs avec un sens générique. C'est le cas par exemple avec vaselina (qui vient de la marque Vaseline), celofán (de Cellophane), aspirina (du mot allemand Aspirin) o clínex (de Kleenex). La même chose s'est produite avec wifi, qui à partir de la marque Wi-Fi, est passé dans l'usage comme un substantif commun grâce auquel on fait allusion à une certaine technologie de communication sans fil... Puisqu'il s'agit d'un terme déjà incorporé en espagnol (même s'il ne figure pas dans les principaux ditionnaires) la Fundéu BBVA recommande de l'écrire en minuscules et sans italiques comme on le fait pour vaselina, celofán, aspirina ou clínex, et sans le trait d'union qui apparaît dans la marque originale.
Une ministre espagnole remet sur le tapis le vieux mythe du « sexisme de la langue » en employant « miembra » au lieu du terme épicène « miembro ». L'usage une fois de plus devrait petit à petit faire son effet face à l'immobilisme de certaines institutions. Affaire à suivre... Cliquez ici.
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